Le Carnaval de Venise – exubérance, liberté et gros sous.

Il y a trois ans Quatre Epices a fait une petite incursion au Carnaval de Venise pour célébrer dignement 2010… eh oui, début février, on est encore au début de l’année non ?

Nous n’avions pas sorti nos costumes, mais nos appareils photo si, et comme deux morts de faim se jetant sur une table garnie, nous avons canardé à qui mieux mieux la magnifique créativité des participants… et la magie du Carnaval a opéré. Ducs et marquises, êtres fantastiques surgis de la mythologie, du fond des océans ou des forêts magiques, angelots et monstres carapacés, etc etc… mais surtout, la profondeur mystérieuse des regards cachés derrière les masques, l’étrangeté des postures et des attitudes choisies, la théâtralité assumée – et généreuse – des costumés… bref, un véritable coup de coeur !

Mais d’où vient cette tradition aujourd’hui devenue si évidente qu’elle en est une étape touristique quasiment obligatoire en Italie ? Elle est en réalité éminemment religieuse, puisque l’habitude de se déguiser à ces dates correspond en fait à l’approche du Carême et de ses petites douleurs. Comme vous le savez sans doute, pendant le Carême, on se prive (de viande, d’œufs, ou des plaisirs de la chair) afin de respecter l’approche de Pâques et de la souffrance du Christ. Par conséquent, connaître une période de plaisirs exacerbés juste avant de devoir entrer dans une période de mortifications et de jeûne semblait tout naturel et tout à fait tolérable dans la société profondément chrétienne du Moyen-Âge. Le carnaval devient la plus belle manifestation de cette expansion de joie, la fête par excellence, au cours de laquelle qui plus est les frontières sont abolies : nobles et pauvres peuvent alors coexister, s’adresser la parole, voire danser ensemble, à l’abri de leurs masques… tout est permis. Le Carnaval de Venise n’est donc pas la seule manifestation de cette période pré-Carême : Mardi-Gras est fêté partout – mais avec plus ou moins de bonheur, de faste… et de longévité. Aujourd’hui il est plutôt chez nous synonyme de fête enfantine. Mais le principe du déguisement a bel et bien été conservé.

Cependant, Venise, où le Carnaval semble exister depuis au moins le XIème siècle, a su maintenir vivace cette tradition – là où les autres villes européennes l’ont vue peu à peu s’effacer. Pourquoi ? Parce que le Carnaval y fait office de facteur de cohésion sociale, une cohésion bien nécessaire dans un pays qui ne connaîtra l’unité qu’au XIXème siècle… En effet, la liberté accordée aux différentes strates sociales de se côtoyer et de se moquer les unes des autres (et surtout, pour les pauvres, de se moquer des riches) offre une forme de démocratie dans ces duchés et ces principautés despotiques. Certes, cela ne dure que quelques jours, mais ils suffisent à maintenir le peuple à sa place le reste de l’année. En somme, le Carnaval de Venise est un exutoire politique – doublé, déjà à l’époque, d’une manne financière indéniable pour la ville, avec tous ces nobles que l’idée de venir se promener incognito dans les rues de la ville amusaient suffisamment pour qu’ils se déplacent de très loin pour l’occasion.

Donc l’année prochaine, si c’est possible, je me fabrique un costume et moi aussi, je joue les princesses mystérieuses ! Derrière mon loup, je fais ce qui me plaît, me plaît…

Slide : http://animoto.com/play/U1KzFuYsZylX1ziczPtJUg

En attendant la galerie sur Quatre épices, vous pouvez voir des photos ici : www.photomatisme.fr

Carnaval de Venise 2010

Article publié le jeudi 21 février 2013